Les principes de l’Ordre et le réveil de la doctrine du Régime Écossais Rectifié
Demande - Quels sont [les] mystères [de la Franc-maçonnerie] ?
Réponse - L’origine, la fondation et le but de l’Ordre
— Instruction historique par demandes et réponses pour le grade d’apprentis, RER, 1782
Il y a à peine plus de dix ans, une poignée de frères rectifiés, hauts dignitaires de la plus haute instance de l’époque pour le Régime Ecossais Rectifié – Le Grand Prieuré Des Gaules (GPDG), alors lié, depuis le 15 décembre 1946, à la Grande Loge Nationale Française (GLNF) qui jouissait d’une écrasante crédibilité – décidèrent de démissionner en bloc de ce qu’ils avaient essayé pendant plus de trente ans de corriger, en vain, de l’intérieur.
Parmi eux et à leur tête, le porte-parole lui-même du GPDG - I.O. Eq. a Crucia Mystiqua - qui avait remarqué depuis longtemps les erreurs grossières qui s’étaient transmises sans scrupule parmi des générations entières de maçons au sein de ces obédiences, pourtant si prestigieuses, mais dévorées de l’intérieur par l’orgueil et la paresse.
Ensemble, ils quittèrent le GPDG avec la conviction inébranlable que leur cause était juste et qu’ils devaient, coute que coute, revenir à l’essence du régime écossais rectifié, en retrouvant les principes fondamentaux de l’Ordre et en respectant la Sainte Religion Chrétienne dans laquelle la Divine Providence les fit naitre.
Le 15 décembre 2012, l’histoire du Régime Écossais Rectifié vit l’avènement du Directoire Nationale Rectifié de France (DNRF) dont l’intention fut très claire dès le premier instant : « La renaissance de l’Ordre, ramené à ses lois primitives » s’appuyant sur le réveil authentique du Grand Directoire des Gaules, qui n’avait jamais été réveillé depuis sa mise en sommeil par Camille Savoire le 3 septembre 1939, lorsqu’éclata la seconde guerre mondiale.
Pour parler du réveil de la doctrine initiatique, conservée dans « cet Ordre par excellence, qui, à défaut de le pouvoir nommer, ne peut être appelé que le Haut et Saint Ordre » auquel nous sommes voués, nous parlerons des principes qui sont à l’origine de ce réveil.
Ensuite nous verrons comment du réveil d’une doctrine ancestrale, nous sommes passés à la refondation d’une école initiatique à travers le Régime Écossais Rectifié correctement pratiqué et installé sur des fondements solides.
Pour terminer, nous parlerons de la renaissance que vise cette entreprise que nous partageons au sein des loges Réunies et Rectifiées, en abordant la destinée que propose la doctrine initiatique du Régime Ecossais Rectifié à ses participants.
LE RÉVEIL, LES PRINCIPES.
Jean-Baptiste Willermoz écrivait à Jean de Turckheim dans une lettre datée du 10 février 1779, à propos de la formidable vitalité de ce qu’il avait compris être le culte primitif « où se trouve l’origine des anciennes initiations secrètes (…) dont on retrouve des vestiges dans toutes les parties du monde (…) ; qui fut conservée pure dans la sainte filiation patriarcale, et dont la tradition transmise d’âge en âge est parvenue jusqu’à nous. »[1].
Il disait ceci :
« Cette doctrine est celle de tous les siècles du monde et de tous les peuples (…) C’est celle qu’ont connue et enseignée les apôtres et tous les hommes instruits des premiers siècles du christianisme, par la voie des initiations secrètes qui l’ont perpétuée et la perpétueront malgré tous les obstacles possibles jusqu’à la fin des siècles, parce qu’elle est indestructible, comme son auteur ; et tant qu’il y aura sur terre un homme à qui elle puisse être utile, elle subsistera avec lui pour être son flambeau. »[2]
On peut donc dire que la réforme qu’entreprit de diriger Jean-Baptiste Willermoz, dont on sent la présence dans son discours dès les Leçons de Lyon en 1774, mais qui, en réalité dut être semée dans son esprit dès le jour de sa rencontre avec Martines de Pasqually et sa réception dans l’Ordre des Elus-Cohen, réforme qui culmina au Convent des Gaules en 1778, a certes établi et constitué une Maçonnerie symbolique fondée non plus, sur trois grades, mais sur quatre, conduisant à un Ordre de Chevalerie, dit « Ordre Intérieur », formé des Ecuyers Novices et des Chevaliers Bienfaisants de la Cité Sainte, mais qu’il a d’abord et avant tout constitué un projet initiatique absolument novateur, dont l’objet spirituel, assigné en propre à ce nouveau système fut clairement celui de la doctrine de la réintégration.
« Être fidèle à l’esprit qui présida à la Réforme de Lyon en 1778, c’est donc s’attacher à cette doctrine afin de la respecter, la travailler et l’approfondir, mais c’est aussi œuvrer à la mettre en pratique sur le plan initiatique, et savoir qu’elle est au cœur de la vie interne du Régime rectifié. » (DNRF-GDDG).
Voilà ce que nous entendons par le réveil de la doctrine.
Or, pour que ce réveil se réalise, il lui faut des principes.
Qu’est-ce que c’est qu’un principe? Un principe, c’est ce que les mathématiques appellent un axiome, c’est ce qui permet de cadrer la pensée afin de lui permettre de bâtir des démonstrations et des raisonnements. Tout élève de cours préparatoire l’a su un jour, c’est Euclide qui fut le premier à faire appel à la notion d’axiome, pour mettre à la source de son système ce que signifie axiome : un principe évident en soi, et donc qu’on ne peut remettre en question sans devoir alors supprimer tout le système qui en résulte.
Un principe, c’est donc une source permanente et immuables de laquelle découle tout un raisonnement logique.
Souhaiter qu’un système perdure tout en niant les principes desquels il procède, c’est un peu comme vouloir envoyer une fusée dans l’espace tout en défendant que la gravité n’existe pas … où (mieux!) qu’il n’y a pas d’univers mais un plafond en carton au-dessus de nos têtes …
Tout le reste (la doctrine, les rituels, les cérémonies, etc) peut être mal compris, mal maitrisé, parfois mal interprété et mal mis en pratique; on peut le tolérer, on peut le pardonner. Mais, lorsqu’il s’agit des principes sur lesquels tout le système repose, on doit être intraitable sur l’observance absolue de ceux-ci, si l’on souhaite donner une chance de succès à cette aventure qui est la nôtre. C’est ce que l’on peut aussi appeler un impératif.
LA REFONDATION, LES FONDEMENTS
Une fois cela bien compris en ce qui concerne ce qu’est un principe, on aperçoit que nous pouvons commencer à donner un socle sur lequel édifier notre système. On appelle aussi cela des bases, des fondations ou encore des fondements.
On va commencer par fonder les choses, en l’occurrence une école de sagesse et de vertu qui mène au temple de la vérité et qu’on appelle la Franc-Maçonnerie, laquelle école lorsque fondée sur des bases solides, elles-mêmes issues de principes immuables qui lui permettre d’évoluer, va permettre à son tour d’éduquer, d’instruire et d’enseigner à ses élèves.
Les fondements de la franc-maçonnerie rectifiée sont donc les textes fondateurs qui forment un corpus littéraire fondamental sur lequel chaque maçon doit s’appuyer : l’apprenti pour les découvrir, le compagnon pour commencer à bâtir sur eux son œuvre personnelle, le maître pour achever ce chef-d’œuvre et, enfin, le maître écossais de St-André pour enseigner cet art de « bâtir dans son cœur des temples à la vertu et des tombeaux au vice ».
À quels textes fait-on référence exactement lorsque l’on parle des fondements du RER ?
Essentiellement de la règle dite « en 9 points ».
Vous voulez bâtir en maçonnerie rectifiée? Commencez par connaitre cette règle le mieux possible. Tu veux devenir un « vrai maçon » qui sais comment ne pas « murmurer dans l’infortune »? Pénètre-toi de cet enseignement de façon intense. « Prêtes à [ses] accents une oreille attentive, et que ton âme s'ouvre aux préceptes mâles de la vérité », entre dans la contemplation silencieuse et intérieure de « ces leçons que l'Ordre t’adresse, pour te faciliter le chemin de la vérité et du bonheur », qu’elles « se gravent profondément dans ton âme docile et ouverte aux impressions de la vertu ».
Voilà, ami lecteur, ce qu’on appelle des fondements solides, issus de principes cadrés.
LA RENAISSANCE, LA DESTINÉE
Rappeler à leur juste place les principes de l’Ordre et entreprendre la refondation de cette école de sagesse, permet de commencer à entrevoir la destinée qui nous est promise.
Si nous parvenons, par nos efforts permanents, notre zèle inlassable, notre persévérance constante et une véritable foi en notre « destinée royale » à rétablir l’Ordre dans son état d’origine, tel que J.-B. Willermoz, L.-C. de St-Martin, Joseph de Maistre, les frères de Turckheim, Léonard-Joseph Prunelle de Lierre, Henri de Virieu, et tout le reste de nos frères en avaient conçu les plans, alors nous pourrons fièrement proclamer sa renaissance, conscients que nous nous dirigeons vers la destinée extraordinaire qu’il promet, c’est-à-dire une noble vie d’homme vertueux qui a rendu son âme digne du vrai bonheur, définition même de la vie bonne dans laquelle « l’intérieur et l’extérieur sont toujours en harmonie »[3].
La conviction qui anima nos frères de France au moment du grand réveil de 2012 et que nous venons de vous retracer, est exactement la même, malgré les ridicules 5.200 km qui sépare la cote Est américaine du vieux continent, que celle qui anime nos loges de la XVIIe province du Canada-Groenland.
Cette intention que nous nous donnons, cette action que nous désirons mener et maintenir pour le Québec, et le Franc-Canada, s’inscrit en entier aux chapitres à venir dans cette histoire du Régime Écossais Rectifié des origines à nos jours à laquelle nous faisons entièrement partie.
Terminons ce discours dont le but n’était autre que de vous édifier cher lecteur, en vous donnant à entendre les principes de l’Ordre, résumés en 10 articles lors du grand réveil le 15 décembre 2012 à Lyon.
Lisez-les donc avec attention ; ils sont un rappel sentencieux des seuls éléments sur lesquels nous devons être intraitables, si nous envisageons un tant soit peu de devenir un jour une assemblée de véritables Chevaliers-Maçons, dans cette Cité Sainte.
⁂
[1] J.-B. Willermoz, 1er Cahier, « Instruction particulière et secrète à mon fils », in Vivenza, Jean-Marc. La doctrine initiatique du Régime Écossais Rectifié en dix leçons essentielles (French Edition) (p. 314). Dervy. Édition du Kindle.
[2]J.-B. Willermoz, Lettre à Jean de Turckheim, 10 février 1779. In Vivenza, Jean-Marc. op. cit. P.195
[3] Platon, Phèdre, [279c]